(English version of the news from Delphine, Damien and their tandem below)
Ou les nouvelles de la Planete.D Elfes, Delphine, Damien et Lirio en Islande
(pour des raisons de greve des accentistes cette newsletter de Planete.D sera sans accent)
(en vrai c’est qu’on a du choisir, le pc portable ou le bebe, et le pc portable etait plus sous garantie, donc on doit bosser sur des ordis islandais, clavier querty celtic, æccrðche tðí ÞeÞe)
C’etait pourtant bien parti…
Avant meme de passer la frontiere francaise nous etions rattrapes par cette nouvelle : “Le ferry pour l’Islande que vous voulez prendre est plein. Faut attendre une semaine.”
‘uper…
Castagnettes, nous exclamamelles, nous ne prendrons donc pas ce ferry au depart du sud du Danemark, mais occuperons la semaine a parcourir ce joli-plat-pays pour aller attraper le ferry suivant qui lui prend la mer du nord (a lire sans reprendre son soufle). Et de fait, pedaler nous fimes, du Danemark du sud au Danemark du nord, ce qui est un peu comme aller des chaussures d’un nain a sa tete coiffee (ca sent toujours les pieds). Une semaine pluvieuse et heureuse, a prendre des douches chaudes dans les eglises et a planter la tente chez les bonnes gens danoises.
(me demande pas pourquoi, toutes les eglises danoises ont des toilettes et des douches en acces libre et en plus c’est propre comme un saoul neuf – par opposition a un ancien alcoolique)
Et que ne flute pas, non ! que ne flute pas notre emoi quand a l’issue de secours (tu vas comprendre) de cette semaine la nous arrivames fleur au fusil au port du nord, l’oeil hagard et le poil terne apres une lutte decharnee contre les elements air (mon cher Wa’son) et eau, pour nous entendre dire par le personnel de la compagnie ferryviere (elle est pas mal celle-la je la garde) “Ah non il y a trop de vent”, sans blague, depuis ce matin on fait du 3 km/h l’alarme a l’oeil, “du coup votre ferry a ete deroute il partira du port du sud.”
Ah-ahhhhhh !
Ahhh ?
Ah.
Ahem…
En clair :
– le 1er ferry au depart du port sud, loupe car complet
– le 2eme ferry, lui, prevu au depart du port nord, part finalement du port sud dont nous venons apres 1 semaine de route
Les Danois, franchement, ils savent rire.
Heureusement ils font des eglises avec douches chaudes et des abris primitifs dans leurs forets, et nous de camper 3 jours pour attendre un 3eme ferry car jamais 203 comme ils disent chez Peugeot.
Photos du Danemark: http://www.flickr.com/photos/42365735@N02/sets/72157624274371839/
(les photos qu’on vous montre sont sur Flickr jusqu’a notre retour car on ne peut pas mettre a jour notre propre site)
Enfin bref, tout ca nous amene quand meme en Islande un jour.
D’ailleurs en parlant de jour… parlons de jour, je peux pas parler de nuit car ici il y a pas de nuit.
Le soleil se cache vaguement derriere la montagne a 1h du matin et en ressort 20 minutes tard. Si tu es au bord de la mer tu le vois se tremper brievement dans l’ocean et ressortir aussi sec (belle performance… se tremper, ressortir sec, tout ca – ahem). Autant dire que notre habitude de caler notre rythme sur le soleil nous a valu une crise de nerf au bout de 3 jours. Compare a chez nous, c’est le jour et la nuit. Enfin je me comprends.
Et notre petite Lirio dans tout ca ? son rythme biologique est un peu sans dessus dessous lui aussi ; non seulement il n’y a plus de nuit (dans la tente, impossible de faire l’obscurite, c’est fou tout ce qu’on peut pas faire dans une tente d’ailleurs…) mais on rencontre des gens tout le temps – ce qui constitue une stimulation permanente – et on roule beaucoup : dans sa cariole, baptisee Citrouille par Delphine qui a aussi de l’esprit, Lirio dort une bonne partie de la journee, delicatement bercee par les chaos violents de notre tandem sur les pistes defoncees de ce pays diabolique, comfortablement abritee des temperatures negatives et les vents a decorner les yeux comme dirait Portos (t’inquiete pas Maman on gere). Du coup le soir venu, son energie n’a d’egale que notre fatigue et ces deux la ne font pas bon menage.
Cet ecueil mis a part, on se regale. Il n’y a rien de complique, ou dangereux, nous semble-t-il, a voyager avec notre bebe ; il s’agit d’une adaptation, d’un amenagement de notre rythme de nomades cyclopedes, comme la vie nous en demande regulierement et qui nous permettent aussi de ne pas nous figer, de ne pas donner dans l’immobilisme intellectuel et de nous stimuler par de nouveaux defis. La petite est heureuse, epanouie, fascinee et fascinante, elle nous occasionne moult rencontres et elle s’eveille a vitesse grand v (elle rampe a 4 pattes a toute allure depuis le Danemark, elle se tient debout accrochee aux meubles et elle marche meme, si on l’accompagne, depuis l’Islande, et puis faut dire que se faire changer les couches fesses a l’air sous la pluie et les rafales de vent sur un neve ca emoustille).
Presentement, les miennes de fesses sont dans un fauteuil qui est dans un sejour qui se trouve dans une maison qui est situee dans un endroit typique de l’Islande c’est a dire :
– son nom est parfaitement imprononcable a moins de courir le risque de se faire une entorse de la langue
– par la fenetre je vois un volcan et un glacier
– les oiseaux volent a reculons car le vent a deja atteint 15m/s et ce n’est qu’une mise en bouche avant la tempete de demain : 30 m/s (108 km/h)
En effet, nous avons atteint ce lieu mythique qu’est Fagurhóls– myri.
Fagurhóls– myri, son tracteur, sa ferme. Sa station-service abandonnee. Nous.
Delphine lit par dessus mon epaule :
“Tu vends pas tres bien le pays, la, comment tu veux que les gens viennent voir notre film ?
– Au contraire, tu sais bien comme ces vicelards aiment nous voir souffrir, tu as vu quand on montre la traversee de la Bolivie ? ca les fait tous marrer
– C’est vrai t’as raison c’est vraiment des enf…
– Ahem au fait tu veux entendre une blague islandaise ?
– Oui vas-y.
– C’est 2 Islandais qui se rencontrent et l’un dit a l’autre ‘Beau temps pour la saison !’
– Ah, elle est bien bonne celle-la…”
Rions un peu en attendant la mort, comme disait ce grand homme qu’etait Desproges.
Revenons a nos moutons – les moutons islandais. Remarque ici il y a en pas, trop de vent, ils se retrouveraient a poil, le marche de la laine s’effondrerait, l’Islande irait a Veau-l’eau (c’est en Bretagne).
Mais enfin, Fagurhóls– myri recele malgre tout une richesse inesperee : sa station-service abandonnee…
Et oui, car c’est la que la fine equipe de Jokull et Einar, guides sur glacier, a elu domicile, et nous avec pour ces quelques jours.
Nous voila integres a une joyeuse bande de jeunes islandais qui ont monte l’an passe une agence de treks sur glaciers. Les glaciers ici c’est un peu comme les vaches dans ma Normandie natale ou les Goretex a Grenoble – tu vois le genre… Ils ont en plus l’amabilite de venir se jetter dans la mer, histoire de nous eviter les troubles de l’altitude si jamais nous prenait l’envie de leur grimper dessus. Alors Einar et ses copains, tous guides emerites, ont eu l’idee de monter Glacier Guides et d’emmener les gens en trek sur la glace. Et nous on s’abritait du vent dans cette foutue station-service quand on a realise qu’elle etait remplie d’etageres elles-memes recouvertes de materiel d’alpinisme et de marche sur glace. La dessus on a fait connaissance avec Anna-Karen, la jeune “maman” de la bande (comprenez la cuisiniere-chauffeur-assistante) et de fil en aiguille est apparu qu’il y avait dans tout ca matiere a filmer pour nous comme pour eux. Me voila embauche comme cameraman sur glacier pour quelques jours, Delphine fait de la cuisine francaise, Lirio slalome entre les jambes de ce beau monde, l’ambiance est aussi chaleureuse que le temps est pourri.
C’est un peu ca l’Islande : faut aller voir au-dela de la pluie comme les paysages sont beaux et il faut aller voir au-dela de la reserve bourrue des gens comme leur coeur est grand.
Nous l’avons experimente deja a notre arrivee : la famille d’Arngrimur nous avait adoptes et un peu comme en Nouvelle Zelande chez David et Sue on s’etait retrouve a travailler dans leur auberge en echange du gite et du couvert. Parcourir les montagnes de ce bout du monde – Bakkagerdi est l’endroit le plus eloigne de Reykjavik, la capitale – en compagnie d’Arni qui nous comptait la vie des ses arrieres grands-parents, dans ces fjords perdus, battus par les vents, attaques par les marees, etouffes par la neige et la glace 9 mois de l’annee, sans soleil, entendre ces histoires de fermes emportees par le vent et dispersees dans l’ocean, est une belle lecon d’humilite.
C’est un peu ca l’Islande : une belle lecon d’humilite.
Et une belle lecon d’humidite.
C’est un pays qui te rappelle regulierement comme tu es petit.
Le long de notre route depuis ces fjords hostiles du nord-est jusqu’a ici, nous avons tate de son humeur changeante, colerique et tellurique. D’un fjord a un autre, d’un versant au suivant, par des cols raides comme la justice, la meteo est bouleversee, le vent tourne, la pluie surgit, les nuages bleuissent, la vegetation mute.
“A propos de vegetation”, me lance Simbi, le guide que j’accompagne partout depuis 3 jours, ” tu sais quoi faire si tu te perds dans une foret islandaise ?
– Euh…” hausse-je des sourcils, dubitatif.
“Tu te leves…”
Les Islandais ont aussi un sens de l’humour feroce.
Vaut mieux le jour ou le vent envoie promener ta baraque par dela les falaises.
Simbi m’a raconte plein de trucs fascinants, mais je vais pas non plus tout deballer maintenant, sinon tu vas pas acheter mon livre.
Il voudrait dissiper un malentendu, m’a-t-il dit hier :
“Les Vikings qui sont debarques ici les premiers ont appele ce pays Iceland parce qu’ils voulaient qu’on leur foute la paix. Mais ca n’est plus necessaire, et le monde croit qu’on habite sur un iceberg. C’est faux ! on devrait changer le nom d’Iceland pour And Ice. On a aussi de la glace, mais pas que.”
Photos d’Islande : http://www.flickr.com/photos/42365735@N02/sets/72157624398506560/
A suivre…
ENGLISH
Dear friends, families, partners and sponsors,
a few quick words from South-East Iceland, a small forgotten (half of a) village which name I shall not dare pronounce in public but only write for my fellow readers to practice voicing out loud icelandic words: Fagurhóls– myri
It’s a typical Icelandic town: 3 houses, a derelict gaz station, sea on one side, glaciers and volcanoes on the other, and a constant gale – right now the wind blows at more than a 100 km per hour. Yet for the coldness of the place as I am depicting it to you, it has what Iceland has to offer: we indeed met here with a group of young glacier guides and they’re hosting us and keeping us warm and dry while the storm drenches and wipe out most of the area (already several cars have been blown of the road).
We’ve been in Iceland for about 2 weeks now and it never ceases to take the breath out of us:
– among the darn steepest mountain passes we’ve climbed (up to 17%)
– probably the strongest wind we’ve experienced along with Bolivia (right now there are blows at 120 km per hour)
– sceneries and landscape that only Icelanders can find normal, where eruptions meet ice and water and air play around with rocks
Nature is here uncontrolled, unmastered, wild and ferocious, beautiful and extreme. The small island gathers in a handkerchief a huge collection of diverse climates and environment. We are now at the foot of the biggest glacier in Europe – second biggest in the world after the poles. We have cycled from North-East harbour down to here through a great variety of landscapes where human presence is so scarce one cannot help beeing constantly reminded how small one is.
Riding and living on the road with our daughter Lirio is however a delight. Comfortably sheltered in her trailer she suffers neither the wind we are struggling against nor the rain we’re soaken by (so don’t start calling us bad parents). She’s growing into a beautiful and lovely young child, crawls out from the tent in the morning to smile at us while we’re making some tea, stands and dizzily walks if we hold her hands, draws people’s attention more, if possible, than our 3 meter long tandem bicycle and well she just fills our days and nights with joy.
Actually she fills our days with joy.
No, don’t get me wrong I don’t mean to say she’s a pain at night – although…
What I mean to say is there is NO night up here. Sunlight 24 hours over 24 and a sun that barely sinks into the sea at 1 am and emerges from it some tens of minutes later. Our body doesn’t know anymore when to rest and when to be active.
At the peak of this phenomenon we were living in a deep fjord with a family running a guesthouse – it is the farest place one can get from Reykjavik, capital city of Iceland, and the locals call it “the end of the road”. People whose Elders have known the conquest of Iceland, a time when farms were blown away to the sea by the wind and mankind had just its will and strength to survive through a 9 month long winter, digging their way out of their houses in meters of snow and ice.
Climate hasn’t much changed but modern technologies help the Icelanders to live better. Still, a nice house with central geothermal heating and a huge 4 wheel drive car don’t make up much for 9 months without sunlight. Those people are tough. Rough and tough.
But once you get to know them well they’re treasure.
And we shall keep hunting for those treasures for a couple months still.
Untill next time, be safe.
Photos of Denmark: http://www.flickr.com/photos/42365735@N02/sets/72157624274371839/
Photos of Iceland: http://www.flickr.com/photos/42365735@N02/sets/72157624398506560/
To be continued
Delphine, Damien, Lirio
Initialement publié le / Originally posted on 15 juin 2010 @ 12:47 pm