La savane de l’enfance
Je conserve de mon enfance le souvenir ému et la sensation douce d’un habit que j’aurais adoré en son temps, porté maintes fois, chéri et usé sans jamais m’en départir, un habit confortable qui serait devenu, avec les années, une forme textile, une forme tissée de madeleine de Proust. Telle fut mon enfance, grâce à des parents qui m’ont aimé, dans le sens fort et vrai du terme, aimé tel que j’étais, inconditionnellement, sans ingérence et avec respect et curiosité.
Car j’en étais une, manifestement, de curiosité.
“Madame Artero, si je vous ai demandé de venir, ce n’est pas qu’il y ait un souci avec Damien, non, mais je m’interroge un petit peu. Quand même.”
Mon souvenir de cette échange entre maman et le directeur de mon école primaire est assez vague, peut-être même l’ai-je fabriqué à partir de son témoignage de l’anecdote. Des images incertaines sont inscrites dans mes cellules neuronales, dans un tiroir estampillé “école Maxime Marchand”. Je pense que j’étais en classe de CM1 ou CM2.
“Il ne joue guère avec les autres enfants pendant la récréation et je l’ai interrogé à ce sujet. Sa réponse m’a laissé… perplexe. Est-ce vrai qu’il est trop occupé parce qu’il écrit son encyclopédie ?”
L’encyclopédie, j’en ai un souvenir précis en revanche. Le marron granuleux de sa couverture. Les reflets métalliques des anneaux du classeur qui brillaient à la lumière comme les boucles d’oreilles d’une gitane. Les pochettes plastiques que j’y entreposais avec parcimonies. J’ai en effet consacré une partie de mon enfance – des mois ou des années je ne sais plus dire – à constituer ma propre encyclopédie, sur les sujets qui me passionnaient – les oiseaux, les avions, les guerres… Des après-midi entiers consacrés à m’abreuver d’articles, de définitions de dictionnaires, de livres d’histoire ou de biologie, sous l’œil attendri, intéressé, et un peu interdit il faut le dire, de ma grand-mère maternelle, pour en extraire la substantifique moelle et remplir de mon écriture chevrotante et de mes croquis un peu gauches un classeur qui prenait en ampleur à proportion du temps que je ne passais pas dehors à m’écorcher les genoux avec mes camardes de classe – mes genoux ont trinqué par la suite, mais comme pour un peu tout, je ne fais jamais ce qu’on attend de moi quand on l’attend de moi.
Je consommais, je crois me le rappeler, dans mes périodes fastueuses, un livre par semaine. Je me revois au petit matin, réveillé avant l’heure et déjà plongé dans un bouquin : je suis debout près du lit, absorbé dans la lecture comme une tâche d’encre sur un buvard d’écolier. Maman, d’autant plus tolérante envers ma boulimie littéraire qu’elle dirigeait (je vous le donne en mille) une bibliothèque, m’habille patiemment. Je lève un bras pour qu’elle y enfile une manche, le regard rivé au texte. Puis la tête, et la brève interruption de la lecture que ce passage suscite me fait frémir d’impatience. L’autre bras. Le pantalon vient ensuite – c’est plus simple de faire le pied de grue sans interrompre ma précieuse lecture.
J’ai du écrire des dizaines de petits romans et pléthores de nouvelles, qui n’ont jamais vu le jour, semé dans des tiroirs de bureau d’abord puis des disques durs par la suite…
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Et au passage vous découvrirez la DNews, ma newsletter décalée, instructive et souvent désopilante.
Quand ma première fille est née, j’écrivais de 4h du matin à 7h le récit de mon tour du monde avec sa maman – Le Grand Détour – avant de changer de casquette pour devenir Papa à domicile tout en œuvrant à Planète.D – et j’ai adoré cette période !
Le Grand Détour au prix spécial de 20€
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Je me demande parfois les pensées qui auront traversé l’esprit de ma maman, si intelligente, si pédagogique, face à un gamin… original. Car jamais tout au long de mon enfance ne m’a-t-on parlé de la notion d’un profil intellectuel atypique. Je réfléchissais beaucoup, tout le temps, à tout ; je ressentais intensément les choses, certes – par exemple, les papouilles de ma grand-mère Manline, toujours elle, mais je reviendrai plus tard sur la notion d’hyper-sensorialité.
Mais je n’avais aucune référence, ni point de comparaison, si ce n’est à m’évaluer à l’étalon de mes camarades de classe et compagnons de voisinage, avec lesquels je désespérais de nouer des relations qui ne m’auraient pas donné le rôle sempiternel du “weirdo*”, mais dont je n’avais pas besoin, au final, pour mener une existence foisonnante – du moins, dans ma petite tête.
“weirdo” : de l’anglais “weird”, bizarre ; on traduirait cela en français par “l’original”, sans doute.
“But I’m a creep
Radiohead, “Creep”
I’m a weirdo
What the hell am I doin’ here?
I don’t belong here”
Initialement publié le / Originally posted on 28 avril 2021 @ 3:41 pm
Merci Damien, j’ai adoré ton article ! Je trouve vraiment génial ton approche descriptive, sans filtre, drôle. Mais du coup, je me pose plusieurs questions. Je me suis en partie reconnue dans la description (et quelque part, ça fait du bien), sauf que je me sens à l’opposé de toi dans ce que j’en fais. C’est-à-dire :
– Je médite pour mieux contrôler ces pensées qui partent dans tous les sens
– Je m’oblige à faire une chose à la fois, même si c’est dur (ref. Exemple atelier, je suis exactement pareil !) Mais je vais me “forcer” à traiter les choses dans l’ordre, même si c’est difficile.
– Je cherche à rentrer dans le moule, à rentrer dans les codes.
Du coup, quelle est la bonne solution ? Je dirai, celle qui ne nous fait pas souffrir 🙂
Et là, je suis arrivée à un point où je ne supporte plus ces moules, ces carcans… Alors il faut oser être soi, et ça passe par retrouver qui on est. Pas facile !
J’ai également une question : as-tu connu un moment”dépressif” dans ta vie, ou justement tous ces effets t’on submergés d’un point de vue négatif (injustice, problèmes de société, incompréhension de notre mode de vie en société qui paraît une aberration, perte de sens totale au travail…).
En tout cas merci pour ton partage.
Salut ! Merci pour ton retour 🙂
Je te rejoins, la bonne solution est celle qui te fait du bien. Moi, je ne retire aucun bien à contraindre ma nature, donc je la laisse s’exprimer, plutôt en veillant à me procurer le repos et le ressourcement nécessaire – à ce titre, courir une heure dans la nature me fait autant de bien qu’une sieste ! Alors ce n’est que mon avis mais autant j’approuve la méditation (je médite – enfin c’est de l’état de conscience modifié – en courant longtemps car je ne tiens pas assez en place pour méditer assis sur un coussin) autant je me demande si te forcer à rentrer dans le moule te soit bénéfique… Quand j’ai accepté de ne plus le faire, je me suis révélé à moi-même et j’ai vraiment commencé à m’éclater dans la vie 🙂
Je n’ai jamais connu de moment dépressif, je suis un éternel joyeux/content mais comme je le dis dans l’article, j’ai précisément conscience que le gouffre est toujours là tout près et je surveille ça ; par exemple en remplissant mon existence de pépites, d’expériences, de rencontres qui me mettent le coeur en joie et compensent largement ! Pour ne pas me sentir submergé je me recentre sur moi, j’assume d’être égoïste, de me donner la priorité, pour mieux et autant que faire se peut rayonner autour de moi 🙂
Belle vie Amandine !
Coucou
Bien dit …. c’est à peu de choses près exactement ça. Je me retrouve dans presque tout mais en ne le vivant pas si facilement que toi. Syndrome de l’imposteur … les mots douance et haut potentiel
me mettent mal à l’aise. Du coup, j’essaie de rentrer dans un moule qui ne me convient pas, et quand j’en sors, ça ne convient pas aux autres. Pfff … ça reste compliqué. J’ai découvert cette “bizarrerie” en cherchant sur le net pourquoi mes 5 sens m’en faisaient baver et bim ! J’ai pris une claque (comme toi quand tu as lu ce livre). Bref on va s’en accommoder hein ….
Merci pour ce partage .
Avec joie Marie, et puis que te dire : fais-toi confiance et respecte ta nature ! Elle revient au galop quand on la chasse, tu te souviens ? ça vaut pour les chevaux et les zèbres j’imagine 😉 Bon courage et bonne rencontre avec toi – comme dirait quelqu’un, “AiMe toi et le ciel t’aidera” ah ah. 🙂
Merci…
Correctif : je sors d’un tunnel de Covid19 qui m’a non seulement fait souffrir physiquement mais également fait plonger dans une phase dépressive, brève mais intense – plusieurs jours de pensées noires, de déprime complète. Première et unique fois de ma vie que je vois les choses avec autant de détresse et amertume. Intriguant. La maladie est partie, et je suis “moi” de nouveau.
Bonjour Damien.
Merci de ce joli site.
Je prendrai plus de temps pour découvrir ces expériences, outils… cela fait du bien!
Merci merci merci!!!
Danièle
Coucou Danièle, merci pour ce gentil mot. Faire du bien c’est ma vocation, à travers des films, des écrits, des publications, des images/photos – tout ce que je peux et sais bien faire. Alors ton retour fait mouche !Bon voyage sur la Planète.D et surtout fends toi d’autres retours j’en suis très friand 🙂 Belle journée.