Journal de bord de la mission Planète.D-2011, 18 février de l’an de grâce.
“Ayé je suis en poste au Café des Cévennes, place du quai à Le Vigan, il fait très beau, la foule se masse aux portes du petit bistrot, j’ignore d’ailleurs quelle partie de leur anatomie ils se massent, j’entends les clameurs des groupies, tiens, des gens se battent pour un trognon de pomme que j’ai malencontreusement laissé tomber en descendant de la limousine.
Ah, une jeune femme vient de perdre connaissance. J’ignore si c’est d’émoi ou de froid car vraiment, c’est pas très malin de se mettre seins nus par cette fraîcheur…
(Mais autrement je n’aurais jamais pu lire “Planète.D for ever” sur sa fière poitrine, le “o” mis en valeur par l’aréole. La gauche.)
C’est pratique ces petits enregistreurs portatifs, ça permet de laisser libre cour à ses pensées, et grand comme un tampon avec ça – pourquoi je pense à un truc pareil tiens, c’est bizarre. Y’a ce chien qui me regarde fixement depuis maintenant 30 minutes en se frottant à la jambe de sa maîtresse, ça a quelque chose d’inquiétant. Surtout qu’il ressemble trait pour trait à un ancien colocataire. Je dois être interviewé par Henri, mais à mes côtés il y a une matrone au casque de cheveux blancs qui refuse de lever les yeux de son numéro de L’Express. Je pense qu’elle le fait Express. Ah-ah. Bon j’espère que c’est pas elle qui va m’interviewer. Je me sentirais obligé de répondre ‘oui madame le proviseur’. Je pense que c’est la princesse Leia. Venue de la lointaine Zytron-B passer une retraite incognito sur Terre dans les Cévennes. Je l’ai reconnue au casque. Avec un truc pareil elle peut faire du solex nue-tête sans peur. Ah, le chien vient de vomir. Sans cesser de me fixer. Ca me met un peu mal à l’aise quand même. Et la question demeure : ils mettent quoi dans leur Perrier tranche, dans les Cévennes, pour que ça me fasse un tel effet ? Oh non ! Punaise c’est pas croya” – Fin de l’enregistrement, on entend un bruit de chute et des exclamations étouffées, quelqu’un crie “il a glissé sur de l’omelette !” et une voix répond “mais non c’est du vomi de croquettes”.
La vie, elle a un côté gendarme caché derrière un bosquet à la sortie du rond-point.
Elle est toujours planquée là où tu ne t’y attends pas pour te rappeler à l’ordre.
Parce que c’est vrai, j’aurais pu m’endormir un peu sur mes lauriers, bercé du doux chant des louanges qui, particulièrement depuis le début de la tournée de février, en Bretagne, avec notre prix spécial du jury au festival de Chartres, et jusqu’à sa fin en Provence, n’ont, c’est vrai, pas cessé. J’aurais pu finir par me croire (presque) une star, me la jouer, me la “péter” comme disent les djeuns, me la “raconter grâââve”.
J’aurais pu avoir besoin d’une douche froide.
Éventuellement.
Note bien le conditionnel.
La vie a pris les devants.
La diablesse.
Elle m’est tombée dessus sur la canebière.
La douche.
Pas la diablesse.
Contexte : Marseille, projection Planète.D au café l’Equitable, cours Julien.
Embouteillages, espace urbain super-dense, planète foot, collines ensoleillées, métissage ravissant, graffitis et odeurs de khébab.
L’organisation attend 40-50 personnes, il y en a une centaine, on commence à envisager de clouer des chaises aux murs, qu’on a déjà poussé autant que faire se peut.
Salle donc archi comble, applaudissements, public ravi (et pourtant c’était notre premier film, l’épisode 1 du Grand Détour, d’un amateurisme à faire la grimace dans sa réalisation technique), je vous l’dis j’étais à deux doigts, deux p’tits doigts de me voir déjà en haut de l’affiche.
Et là…
“Tu t’entends parler ?”, m’apostrophe un jeune homme à la prunelle torve et la boucle brune.
Pas tout à fait dégrisé par le ton sans appel que je ne relève d’abord pas mais qui allume un léger signal d’alarme dans ma petite tête, je réponds “Non !”
Et je souris de toutes mes dents de normand.
(ce sont des dents de lait, forcément)
Moue dubitative de la partie opposée.
“C’est toi qui écris la voix-off ?
– Oui. Pourquoi ?
– A chier.
– Ah quand même… (je sais que rares sont les gens qui osent la critique négative mais là ça engage fort)
– A chier, soporifique, nul, minable…
– Et bien et bien… (grand moment de solitude au milieu de 100 personnes, une performance)
– Non mais tu fais des efforts, mais c’est pas ça. Pas ça du tout.
– …
– Toutes manières, dès le début du film j’ai compris.
– Compris quoi ?
– Bah votre humour fracassant, là, vos mises en scène, vos blagues.
– Mmmmh ? (va-t-on se rattraper sur l’humour ?)
– Bah je me suis dit tout de suite, je veux pas le regarder ce film.
– Ah. C’est balot.
– D’ailleurs je l’ai pas regardé.
– (sourcil levé)
– Me suis barré.
– Ah, mais dis-moi c’est surprenant que tu me fasses un retour critique sur un film que t’as pas vu, non ? (je sais je sais, j’ai pas pu m’en empêcher, trop orgueilleux le mec)
– Oh, ouais, bof, j’ai entendu, et puis je sais.
– Ah bah alors si tu sais…
– Non mais le prends pas mal, pour un amateur c’est pas si catastrophique hein ?”
Et de me planter là au milieu des courants d’air du hall de gare déserté de mon amour-propre.
Alors certes l’individu avait l’oeil humide de la beuverie avancée, et la gorge rauque qu’on a rincé au houblon.
Certes une charmante dame est venue à moi avec ces paroles de réconfort : “Te formalise pas, il fait toujours ça, il agresse les gens pour faire son intéressant mais c’est pas un mauvais bougre”
Et certes, la grosse baffe que ça ma collé m’a fait profiter d’autant plus du sourire chaleureux de la très jolie blonde qui juste derrière m’a dit “Moi aussi je suis dans la vidéo, et ton film était super, faut pas du tout en avoir honte, chapeau, du bon boulot, vous êtes très chouettes, j’ai passé un excellent moment !”
Certes.
Ce soir là, curieusement, je me sentais plus d’allant pour, et d’affinités avec, les gentilles dames et les jolies blondes que les jeunes critiques imbibés.
N’empêche que ça fait du bien.
C’est sain, de se faire remettre à sa place, de temps en temps. Une bonne remise à l’heure de la pendule égotiste.
Parce que sinon, on risquerait d’oublier qu’on est tous des débutants un jour et qu’on ne doit jamais (jamais) se reposer sur ses acquis.
Si je l’avais brièvement perdu de vue, peut-être, grisé par le succès finalement relatif de Planète.D, cet épisode finalement bien marrant m’aurait remis en ligne de mire que je ne suis qu’un amateur, au départ, un éternel débutant, que le progrès à faire est toujours plus important que le chemin déjà parcouru et qu’il faut encore et encore bosser pour devenir meilleur.
C’est valable pour le réalisateur, l’auteur, l’être humain.
Comme dit le Dalaï Lama, nos ennemis sont nos meilleurs professeurs.
Alors merci à toi, mon inconnu de l’ivresse d’un soir, car si tu n’es pas, bien sûr, mon ennemi, tu as été un bon professeur.
Sinon ayé c’est acté :
Je pars travailler (certains le savent déjà) pour une agence renommée de trek, Fjallabak, en Islande cet été ; je vais encadrer des treks à vtt qui vont traverser des régions superbes et hostiles du centre islandais.
TARATATAAAAAAVENTURE EN ISLANDE
Alors voilà une affichette qui résume l’offre :
https://www.planeted.eu/share/Fjallabak-trekvtt.pdf
et puis le site de l’agence Fjallabak donne le détail de l’aventure :
http://www.fjallabak.is/voyage.php?idlangue=3&idvoyage=160&id_texte=219
Ça serait chouette de diffuser l’info autour de vous à qui peut être tenté, ou de vous-mêmes vous poser la question : “Cet été, vais-je aller me cuire le thorax que j’ai glabre sur la Côte d’Azur, et prendre 5 kilos à manger des chouchous et des glaces pour tuer le temps, ou vais-je enfin laisser le troll en moi (qui lui a le torse velu) s’exprimer ?” et vous verrez, vous vous répondrez certainement “Oui, Seydisjfjördur ! (c’est comme saperlipopette en islandais) Je vais aller bouffer de la poussière et pédaler dans les paysages extraterrestres d’Islande et m’en payer une belle tranche et revenir heureux, des panoramas somptueux plein la tête, quelques morsures de nains sur les mollets (pas de chiens en Islande mais pas mal de créatures bizarroïdes) et je vais adorer ça !”
Je peux répondre à vos questions sur Skype (planete.dd) ou Facebook (oui oui) et vous pouvez voir directement avec Fjallabak, sinon, en venant de ma part : info@fjallabak.is / www.fjallabak.is
Dans la série des annonces à caractère plus personnel…
Delphine et moi avons rejoint un projet d’Habitat Groupé à Pontcharra, entre Chambéry et Grenoble. Le collectif a besoin de quelques familles / foyers / individus pour être au complet. On recherche, de manière explicite, des jeunes sans enfants ou des célibataires, des retraités, afin d’accroître la mixité sociale. Alors avis à celles et ceux pour qui partage, solidarité, économie et écologie, mutualisation des ressources et des savoirs (savoir-faire, savoir-vivre) et échange sont des valeurs primordiales :
https://www.planeted.eu/share/LesGranges-affiche.jpg
En quelques mots ?
Qui ? 5 familles (aujourd’hui), avec ou sans enfants ; des profils professionnels variés : pompier, auteur-réalisateur, enseignants, informaticien ou assistante maternelle, architecte… des parcours de vie divers : sportifs, voyageurs, artistes, amateurs de culture, lecteurs…
Quoi ? L’esquisse actuelle présente une grande bâtisse, idéalement orientée plein sud, et composée d’une variété d’appartements, du T2 au T5. 2 granges seront réhabilitées pour les communs, et l’habitat disposera d’un jardin, d’un potager, d’espaces verts. Nous visons en outre le label BBC et oeuvrons pour satisfaire nos exigences…
>>> Empreinte écologique minimisée dans la construction : matériaux écologiques, haute performance énergétique, minimiser les énergies grises, gestion des eaux, architecture bioclimatique, énergies renouvelables, habitat compact
>>> Empreinte écologique minimisée au quotidien : notre habitat doit tendre vers une simplicité volontaire ou sobriété heureuse au travers d’une consommation raisonnée limitant les déchets, favorisant les déplacements doux
Où ? Le terrain de 2424 m2 se situe sur la commune de Pontcharra, sur un espace déjà construit et un périmètre urbanisé, dans la vallée du Grésivaudan, à mi-chemin entre Grenoble et Chambéry. La gare est à 1 km, le centre-ville et tous ses commerces au bout de la rue, et on trouve à proximité écoles, crèches, cinéma, médiathèque…
Vivre ensemble… L’habitat groupé, kézako ? Il s’agit d’une démarche collective et participa(c)tive qui se nourrit des apports de chacun et chacune. Au sein du groupe nous sommes libres de nos opinions et de les formuler, non de vouloir les imposer. Nous voulons cultiver l’altruisme et le sens du collectif dans le respect de l’intimité de chacun. Nous rechercherons une manière d’être ensemble avec bienveillance, écoute, authenticité, respect des différences et des choix de chacun.
Plus d’infos :
http://lestoitslies-pontcharra.blogspot.com
contact-les-granges@les-toits-lies.org
Fanny 04 76 45 87 75
Bien entendu, libre à vous de diffuser l’annonce ci-dessus, de contacter nos copains de Pontcharra pour venir voir ce qu’il en est, rencontrer le groupe constitué, de vous projeter un peu en discutant avec notre architecte… Et oui, on continue à offrir du rêve à Planète.D ! 😉
LA DNEWS C’EST FINI POUR SE MARRER UN BON COUP FAUDRA ATTENDRE LA PROCHAINE FOIS ET D’ICI LA TA VIE SERA MORNE ET DÉSOLÉE JE SAIS.
Initialement publié le / Originally posted on 19 février 2011 @ 12:58 pm