Autorité & liberté
Je suis un adulte limité, un humain faillible, un père imparfait. Être écouté, voire obéi, par/de mes enfants, cela relève en vérité d’un besoin (collégiale, non pas égoïste : le fonctionnement de la tribu en dépend) et pas d’un dû – d’un besoin que la cohabitation se déroule harmonieusement pour tous et que chacun y trouve son compte. Ce n’est pas du tout une déférence que mes enfants me devraient sous prétexte que je suis leur géniteur (balivernes !). Le respect, n’en déplaise aux vieux cons, ne sera jamais pour moi une affaire d’ascendance ni d’aînesse appliquée à la chronologie familiale.
Je ne m’en cache pas auprès de mes filles : quand la patience s’étiole, quand l’énergie manque, quand des bornes de saine cohabitation sont dépassées, je préviens que je vais avoir recours à mon #autorité et je ne le maquille pas quand c’est aussi par faiblesse ou fatigue ; par ailleurs, je justifie toujours les limites que je pose et encourage mes enfants à les questionner, ces limites, si elles reniflent non pas une règle issue du bon sens mais une borne posée pour ma propre convenance ou mon propre confort. Si dans leur logique futée et vivace, elles repèrent une faille à mon raisonnement ou ma posture, elles savent que je suis apte à le reconnaître et à modifier mon cap. Pour leurs avoir prouvé cette ouverture et cette humilité, j’ai gagné leur respect inconditionnel par ailleurs. Cqfd.
Il m’arrive même parfois de ne pas justifier mon autorité mais d’expliquer que de façon non consensuelle, je décide, point, car cela reste ma responsabilité que de gérer la tribu, c’est moi qui m’occupe d’elles et que pour se faire, je peux agir de façon autoritaire et arbitraire – l’autoritarisme se distingue de l’autorité. Mes enfants ont besoin de savoir où nous allons et de pouvoir se fier à moi pour nous y emmener.
Mais d’une façon générale, je prône un modèle simple.
- appliquer peu de règles
- les définir et les justifier clairement
- savoir les remettre en question sur proposition pertinente de l’enfant
- donner le plus de liberté(s) possible(s) par ailleurs
Ma récompense est éclatante : mes filles respectent ma parole, obéissent dès que cela est nécessaire (j’insiste, oui, car l’obéissance n’est pas un dû de l’enfant, c’est un mérite de l’adulte) – une simple accentuation du ton de voix suffit à leur faire passer le message que nous avons franchit un seuil de tolérance au-delà duquel il n’y a plus de marge de manœuvre pour elles. Oui, cela implique de savoir, parfois, faire claquer ses cordes vocales comme un coup de fouet. Ce n’est pas de gaieté de cœur mais, reconnaissons-le sans fausse pudeur ni atermoiements contre-productif, si l’on veut se faire écouter en tant qu’adulte, il faut y mettre une pleine intention. Moi le premier, je ne prêterais aucune attention à des consignes qu’on me donnerait sur un tout doucereux qui se trahit d’entrée de jeu, car j’aurais alors l’intime conviction de ne pas craindre les représailles. Je ne menace jamais mes filles, et pour cause : j’ai démontré quelques rares fois que les sanctions annoncées tombaient immanquablement, ne serait-ce que par sens de la cohérence. Elles savent à quoi s’en tenir quand le ton se durcit. Comble de la transparence, j’appuie alors un tel raffermissement par l’annonce verbale sans équivoque de mon accès à la colère.
C’est pendant le projet “Autarcies” que l’imperméabilité de Lirio à l’autorité nous a donné du fil à retordre… La bande-annonce suivante en donne un bref aperçu !
Avec cela, il va de soi qu’il faille bannir obligations, chantage affectif et manipulation(s). Je ne supportais pas, enfant, qu’on me baratine ou qu’on m’embrouille, je ne compte pas servir de cette soupe à mes mômes, elles valent mieux que ça.
Pour ce qui est de la #liberté, je puis résumer ainsi l’attitude que j’ai adoptée : j’ai désappris à dire “non”, ce non qui souvent est chez le parent une forme d’autoprotection (c’est notre confort ou notre énergie, bien souvent, qu’on cherche à préserver, au détriment de l’épanouissement de l’enfant ; le non devient alors un automatisme chez l’adulte et une prison chez l’enfant dont l’éventail des possibles se fane). Je me suis forgé la mentalité de Jim Carrey dans “Yes Man” – à toutes les demandes de mes enfants, je réponds de prime abord, en moi-même “Pourquoi pas ?” et je sonde mes limites s’il y en a afin de pouvoir dire un “oui” sincère – qui ravit les gamines – ou, le cas échéant, un “non” argumenté/explicité (plus rare). Je n’ai aucun mérite à cet accomplissement : j’étais juste déterminé à offrir à mes filles le papa qu’il aurait fallu au petit zèbre que j’étais (N.B. Je ne fais pas ici de procès sous-jacent à mon père qui est un homme magnifique, bon, droit, fiable et généreux ; je tiens un discours rhétorique tout en ayant la justesse de reconnaître, avec tout l’amour que j’ai pour mon paternel, qu’il était sans doute un peu dépassé par le phénomène que j’étais…).
Exemples/Astuces
Pour les responsabiliser autant que pour m’alléger la charge, j’ai toujours demandé, gentiment mais fermement, à mes enfants de participer aux tâches ménagères. Depuis leur plus jeune âge, elles débarrassent et mettent la table par exemple.
Mes sanctions, rares s’il en est, tombent immanquablement, même si mes propos dépassent le raisonnable – cohérence quand tu nous tiens. J’ai ainsi une fois menacé Lirio de la sortir de la maison si elle persistait à mettre le bazar et j’ai appliqué la sanction… alors qu’il pleuvait des cordes. La petite a passé une poignée de minutes sous le déluge, un peu stupéfaite que je sois allé au bout de ma démarche, mais pas assez longtemps pour en souffrir autrement, et ensuite nous avons parlé.
L’autorité ne doit jamais museler les émotions et je m’évertue à respecter mon enfant comme mon alter-égo. Nous devons pour ce faire entretenir un espace sain d’échange.
Je vous invite à lire la suite, 7 petits chapitres en tout, voir les liens plus bas.
Initialement publié le / Originally posted on 18 novembre 2020 @ 2:44 pm